Enfants d'Espagne

Enfants d'Espagne

22.10.09

LA GUERRE, LA DROGUE ET LES ENFANTS D'ORANGE


Photographie : Petronella Ytsma


Hélène C. nous signale l'article de Bakchich consacré à l'affiche immonde présentant un jeu vidéo vantant les mérites de la guerre (voir deux articles précédents). Les placards arrachés ont été remplacées, mais certains n'ont pas désarmé : des stylos feutre contre le pouvoir meurtrier de l'argent qui sacrifie les enfants.


B. Zon

DROGUE

Le film de Kathryn Bigelow Démineurs commence par ce carton "La guerre est une drogue". Le film (à l'impressionnante mise en scène) en reste seulement (et sans engagement hélas) à ce constat ; pas d'héroïsme, seulement des poussées d'adrénaline qui ne mènent au mieux qu'au vide (un mur de paquets de corn-flakes) ou à la mort des autres ou de soi-même (le but mal avoué du militaire). Howard Zinn a dit que la guerre était la drogue des Etats-Unis d'Amérique. Elle peut aussi être son motif même (existe-t-il encore des naïfs qui ne font pas le lien entre la culture du pavot et la guerre d'Afgnanistan (+ 218 % entre 2005 et 2007). Au moment où un rapport évalue une progression spectaculaire de la consommation de cocaïne en France (qui ne serait plus seulement réservée aux zélites, zartistes, zintellectuels et zélus), les couloirs du métro parisien et les autobus font l'apologie, avec cette saleté d'affiche publicitaire, de la guerre et des sensations qu'elle procure ; on peut s'essayer avec un jeu vidéo dont Orange (filiale pour la téléphonie mobile et l'Internet du groupe France Télécom, spécialiste du suicide de ses employés) fait la promotion comme si on y était.

Démineurs de Kathryn Bigelow

AGENT ORANGE

Le 27 septembre, Petronella Ytsma présentait à l'Université St Catherine de St Paul-Minnesota son livre Legacy of an Ecocide: "Agent Orange Aftermath”. La photographe s'est attachée, lors de plusieurs voyages au Viet-Nam, où elle s'est rendue en premier lieu en 2007 pour d'autres motifs, à montrer les effets de ce défoliant (largement utilisé par l'armée américaine durant la guerre du Viet-Nam) sur les corps et la nature. L'agent orange a été inventé par la société Monsanto, championne mondiale des poisons herbicides et des OGM. Si certains vétérans de l'armée américaine se sont retournés contre leur gouvernement (qui là comme ailleurs bénéficie d'une étrange immunité), c'est encore plus difficile pour les populations vietnamiennes qui subissent aujourd'hui encore et pour longtemps les effets criminels de ce produit chargé en dioxine. Lors de cette rencontre, Susan Hammond, responsable du "War Legacies Project", fait un point précis sur l'action de son association entièrement dévouée aux victimes et aux méfaits persistants de l'agent orange avec des progrès notables, mais peu de reconnaissance et d'aide (en comparaison de l'étendue du fléau). Petronella Ytsma commente avec une émotion qu'elle a du mal à contenir, ses photographies projetées sur écran montrant les familles et enfants aux corps dégradés et diformes, et son espoir que celles-ci puissent être vues au delà de leurs qualités photographiques comme activant les consciences en permettant de vrais gestes. Une femme dans l'assistance interroge : "Est-ce que ça pourrait arriver encore ?". La question désarmante de naïveté surprend ! Les participants répondent à cette citoyenne d'un pays pour qui la guerre est une drogue effective depuis longtemps (et pour longtemps) que c'est arrivé depuis (voir les effets de l'uranium appauvri dans la première guerre du golf, 290.000 kilos contaminant les champs de batailles) et que ça se passe MAINTENANT. Les images de Petronella Ytsma devraient suffire à constituer l'antidote à toutes les saloperies publicitaires vantant l'excitation de la guerre, le poisons de Monsanto et toutes les intoxications de nos esprits et de nos corps.

L'armée du crime de Robert Guédiguian

TASER ET AFFICHE ROUGE

Un jeune homme de 19 ans a été tué la semaine passée en Californie par un policier utilisant un pistolet Taser. La société Taser recommande aux utilisateurs de ne pas trop viser les poitrails. La guerre "comme si on y était" a sa limite : la mort ! Aujourd'hui, lecture obligatoire de la lettre de Guy Moquet dans les établissements scolaires de France. Les enseignants contrevenants seront punis. Pas question de résister à cette injonction. Transformer l'extrême horreur du passé en imagerie d'Epinal est aussi une manière criminelle. Un vrai débat sur la résistance ne s'arrêterait pas à la seconde guerre mondiale (qu'il est important de comprendre pour TOUT ce qu'elle implique) mais à toutes les résistances passées présentes et (on l'espère) futures. Il n'est pas de devoir de mémoire, il n'est pas de souvenir à honorer, il n'est que de la mémoire consciente, active et présente. La force d'un film récent de Robert Guédiguian consacré au groupe Manouchian, L'armée du crime, réside surtout dans le choix des acteurs qui portent le film au-delà du mythe (le film n'échappe pas aux petites biffures classiques des sympathisants communistes) et interrogent de façon contemporaine sur le vrai sens de la résistance. Sans prendre le relai de ces films, de ces photographies ou d'autres prévenantes expressions "artistiques", nous devenons de simples spectateurs collaborant au spectacle pour qu'il ne soit cruellement jamais dépassé.

Petronella Ytsma’s : Legacy of an Ecocide: "Agent Orange Aftermath" (avec Susan Hammond, Charles Bailey, Brenda Paik Sunoo)

Seconde par seconde le coût de guerre depuis 2001 pour les USA

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Un lien pour acheter le livre ? Merci