Enfants d'Espagne

Enfants d'Espagne

12.2.24

DAMO SUZUKI

 

Les chansons qui hantent... comme "Sing Swan Song" que le groupe Can enregistra en 1972 avec son chanteur Damo Suzuki dans leur disque Ege Bamyasi. Elle fut reprise en 2005 par le trio Denis Colin avec Didier Petit, Pablo Cueco et la chanteuse Gwen Matthews pour l'ouverture de leur album Songs for Swans. Temps de cygnes...

6.2.24

THIERRY DE LAVAU

 

Thierry De Lavau avait pris la parole, lors de la cérémonie funéraire de Gérard Terronès en mars 2017. Il y dessinait, de mémoire, la précise silhouette de tous les idéaux portés par le proverbial producteur. 

Cet anarchiste mélomane, avait aussi, comme Terronès mais dans un autre champ, été producteur, en fondant avec Yves Lecarpentier, V.I.S.A., maison qui vit les premiers pas de groupes comme Berrurier Noir, ou en 1984 du groupe islandais K.U.K.L. dont la chanteuse s'appelait Björk. Ses goûts prononcés pour les formes les plus jusqu'au-boutistes du rock avaient portes grandes ouvertes pour le jazz ou les musiques de ce que Gato Barbieri avait étiqueté comme Third World (Thierry est né en Guinée). Bien sûr on connaissait Thierry De Lavau pour être un des membres fondateurs de Radio Libertaire, mais c'est aussi parce qu'on le rencontrait dans les concerts et dans les manifestations (concert + manifestation, une équation à retenir), que les proximités s'établissaient tout naturellement. Ce sentiment d'être là où il fallait ! 

Tiens, ici quelques mots sur May Picqueray, que, jeune militant, il avait connue. Il parlait superbement de l'œuvre d'Aimé Césaire, pratiquait la plongée sous-marine, avait une conscience aigüe de l'écologie (fidélité à Élisée Reclus), aimait les enfants (plus récemment la joie d'être grand-père), s'occupait activement d'insertion et passa une dizaine d'agissantes années au merveilleusement invraisemblable studio Campus (Paris XI) avec son camarade Jean-François Pauvros, lequel l'avait rencontré dans une manifestation. Il photographiait aussi très très bien. Une idée de suite toujours à venir.

Passer à Traffic, l'émission débordant les cadres (toutes les façons de musiques du monde) qu'il produisait avec Agnès sur Radio Libertaire, était un grand plaisir parce que son ressenti, et celui d'Agnès, de "nos musiques" nous éclairait, mais aussi parce qu'on y découvrait beaucoup de choses nouvelles et que la musique y paraissait furieusement comme un essentiel de nos vies. Les conversations se poursuivaient lors de manifestations ou de concerts (à Sons d'Hiver dont il était un fidèle, ou au Farniente Festival à Saint Nazaire, par exemple).

Avec la musique comme élément nécessaire au développement de l'expression, à sa liberté, Thierry De Lavau a su traverser son temps, su écouter, su voir, su saisir activement en toute insoumission* . Il nous a quittés le 26 janvier 2024.

* avant que ce soit une marque déposée

  Photographie : Florence


 

4.2.24

WAYNE KRAMER

Wayne Kramer est mort ...

John Sinclair, poète, créa le White Panther Party (groupe américain blanc antiraciste) en réponse à une remarque de Huey P. Newton. Bête noire avérée de J. Edgar Hoover, Sinclair, à Detroit, fut le manager du groupe de rock MC5, saisi par le quelque chose de sauvagement neuf de sa musique. MC5 (MC pour Motor City, surnom de la très ouvrière ville de Detroit) fut créé à l'initiative de l'ébouriffant guitariste Wayne Kramer. "Lorsque j'étais adolescent, la pensée de passer le reste de ma vie dans une usine était vraiment déprimante. L'idée de devenir musicien m'a donc ouvert des perspectives que je n'avais pas envisagées autrement."
 
Sinclair avait partagé sa passion du free jazz avec Kramer et le profil de Coltrane figura sur le premier 45tours (1968) de l'explosif groupe. Suivant immédiatement, un premier album, l'impératif incendiaire "live" Kick out the jams, ouvrage défiant toutes les lois en lice dans la diffusion de la musique, scandalisant la critique. L'expression "album live", ici, n'était pas une option complémentaire, mais le nerf grandissime de la proposition.
 
John Lee Hooker y est salué dans une violente interprétation de "Motor City is burning" où le chanteur Rob Tyner hurle : "Ouais, baby, Détroit est en train de cramer, et il n'y a rien qui puisse empêcher ça. Détroit crame et la société blanche n'y changera rien", Sun Ra aussi avec "Starship" en conclusion de l'album. Au free jazz en vigueur, MC5 offrait une réponse du rock non moins vigoureuse et terriblement politique. Lors de la Convention Démocrate à Chicago en 1968, le rassemblement contre la guerre au Vietnam s'achève dans la brutalité policière après que MC5 joua plus de 8 heures. Deux albums en studio, marquants, puis séparation. "D'un point de vue esthétique, nous avons connu un énorme succès. D'un point de vue économique... il n'y a pas eu de succès. Il s'agissait de la musique du futur et malheureusement, le groupe n'avait pas de futur."
 
Wayne Kramer prit quelques chemins qui le conduisirent quatre ans en prison où il rencontra un copain de Charlie Parker, le trompettiste Red Rodney. Devenu charpentier tout en continuant une vie de musicien, passant de groupes en groupes (Was (Not Was), Gang War), Wayne Kramer demeura ce musicien à l'insubmersible différence. 
 
On l'entendra toujours, Wayne Kramer est vivant.

Photographie : Hugh Shirley Candyside

1.2.24

LE JAZZ COMPOSER'S ALLUMÉS ORCHESTRA ET SES MULTIPLES

 

L'une des nombreuses spécificités du Jazz Composer's Allumés Orchestra (mark II comme on dit dans les magazines de rock'n'roll) lors du concert du Mans le 27 janvier à Les Allumés du Jazz font Salon, était de compter en son sein, non seulement deux batteurs (comme chez le Grateful Dead, Ornette Coleman, James Brown, le Clarke Boland Band...) soit Bruno Tocanne et Samuel Silvant, mais aussi trois pianistes au claviers rouges (Miles Davis l'avait fait avec une autre couleur) Didier Frébœuf, Xavier Camarasa et Tony Hymas. L'orchestre comptait également deux violonistes : Sarah Colomb et Anne Foucher, trois clarinettistes : Catherine Delaunay, Jean-Brice Godet et Étienne Cabaret, quatre saxophonistes : François Corneloup, François Cotinaud, Florent Dupuit et Antoine Viard, deux trompettistes : Nicolas Souchal et Rémi Gaudillat, une flûtiste : Fanny Ménégoz (parfois deux, Florent Dupuit la rejoignant à l'occasion), une altiste : Élisa Arciniegas et un contrebassiste : Nicholas Christenson. Pour paraphraser Balzac : "Un trésor de souvenirs".