À l'heure où les institutions montrent des signes d'impatience d'éviction des producteurs de musique enregistrée indépendants (une équation se réduisant à : dictature technologique, État, institutions décideuses, GAFAM et associés uberisants, qui oblitérerait les esprits de compagnonnage, d'aventures pour les réduire à de simples dossiers à "gérer"), il est bon que l'on se souvienne de ces commensaux que furent et sont les producteurs indépendants prêts à un bon bout de route avec musiciens et musiciennes.
Robert G. Koester par exemple, extraordinaire disquaire (autre acteur primordial du développement humain de la musique) et producteur indépendant de l'étiquette Delmar en 1953, enregistrant et documentant (terme qu'il affectionnait) avec soin des bluesmen (Big Joe Williams) et figures de New Orleans (George Lewis). Installé à Chicago en 1958, Delmar deviendra Delmark (question de copyright) et Koester - même si "méfiant" de l'avant-garde - y ouvrira ses micros attentifs à la jeune génération en train de faire sa révolution, soit Roscoe Mitchell, Joseph Jarman, Anthony Braxton, Muhal Richard Abrams, Maurice McIntyre. Delmark, pierre angulaire du "nouveau jazz" envisagé comme complément nécessaire de ces grandes musiques noires abattant les frontières. Ce qui ne l'empêchera donc nullement de poursuivre sa passion du blues avec Junior Wells, T-Bone Walker ou Magic Sam, de piquer des pointes avec Earl Hines, Barney Bigard, Ira Sullivan ou Yuseef Lateef ou soigner quelques perles saturniennes de Sun Ra (le catalogue Delmark compte près de 350 références). Robert G. Koester, pour qui le streaming "is killing us" demeura disquaire au long de toute une vie qui vient de s'achever ce 12 mai 2021. On aimerait d'autres événements beaucoup moins tristes pour spécifier la capitale implication des ouvreurs de musiques.
Photo : Psychedelic Baby Magazine
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