Salut les ours !
Salut les chats !
Salut les bisons !
Salut les oiseaux !
Salut les tortues !
Salut les baleines !
Salut les pingouins !
Doucement les castors !
Enfants d'Espagne
8.5.07
MAYDAY
Dimanche 6 mai, jour d’élection présidentielle en France forcément funeste ; alors plutôt que de chercher frénétiquement sur Internet les informations officielles, les réactions des uns et des autres, les larmes de crocodiles, la danse des moutons, le twist des autruches, mieux valait se joindre à Minneapolis à la désormais traditionnelle Mayday Parade organisée par la compagnie de théâtre de marionnettes Heart of the Beast.
Cette année ce rendez-vous créatif de toutes les minorités, tous les âges, tous les groupes affichant leurs différences, tous ceux qui ne peuvent habituellement se faire entendre, avait l’eau pour thème ( Somos Agua – en espagnol) ; ce qu’on lui doit, ce qu’elle aide à créer, ses pollueurs, ses profiteurs. Lors des ateliers dans les locaux d’Heart of the Beast, les deux semaines précédentes où enfants et adultes préparent masques, constructions invraisemblables et marionnettes géantes, un petit garçon, du haut de ses 10 ans, ne s’y retrouve pas. Il dit “mais ce n’est pas organisé, qui dirige, qu’est-ce que je fais ?”. Une jeune fille de la compagnie lui répond qu’il fait ce qu’il veut avec le matériel disponible et que s’il a besoin d’aide, elle ou d’autres la lui apporteront volontiers. Elle lui explique le rôle de l’eau, son opposition à sa privatisation et le sens de cette entreprise collective. La diversité est réjouissante, enfants, parents d’origines fort diverses. Ici, les immigrés, les classes les plus malaisées viennent facilement car personne ne les prend de haut. Tout est réellement heureusement fraternel. Le petit garcon, aidé par un jeune mexicain et une petite somalienne, fera finalement un masque de poisson en riant beaucoup. Il a compris.
C’est la même atmosphère qui règne dans le défilé. Cette année, ce sont des représentants des différentes tribus indiennes que l’on trouve dans le Minnesota, Ojibways (ou Chippewas), Dakotas, Lakotas et Mic Macs, qui ouvrent avec chants et danses (il n’est pas anodin que cet événement soit un des rares où les Indiens se retrouvent avec les autres). Ensuite, ce sont les cinq parties racontant l’histoire de l’eau où, après ses merveilles, les croassements des grenouilles, entrecoupés de fanfares jouant "La Cucaracha", "We shall overcome", des chansons de Woody Guthrie, du funk ou des airs cubains, après les représentants du gâchis et du profit, un magnifique ours blanc géant hurle sa peine. Il y a beaucoup de participants qu’ils soient spectateurs ou acteurs. Les masques et marionnettes sont splendides, heureux ou saisissants. Le long du trajet, qui part du quartier mexicain de Minneapolis, pour traverser ensuite les anciens quartiers hippies, les gens affichent la couleur comme ce vétéran noir du Viet Nam qui a construit dans son jardin une sculpture gigantesque contre la guerre et la répression policière. Après l’ours blanc, un groupe habillé comme les tortures d’Abu Graib ouvre la seconde partie du défilé. Ce sont toutes les associations, tous les groupes différents qui participent, les pacifistes, les païens, les anarchistes, les cyclistes punk avec leurs bicyclettes à étages et leurs tandems sans fin, les femmes contre la folie militaire, les associations d’immigrés et d’aides aux immigrés, l’American Indian Movement (né à Minneapolis à la fin des années soixante, on reconnaît quelques anciens des combats de ces années-la), les féministes, les zapatistes, les mexicains en costumes, revendicant leurs origines indiennes, l’association contre les brutalités policières, les gays, les ennemis de la vivisection, les athés pour la tolérance, les vétérans contre la guerre (partie poignante du défilé, ces anciens combattants qui viennent dire leur horreur de la guerre et qui sont parmi les plus actifs contre les décisions du Pentagone), les nudistes du Minnesota, les Hare Krishna ayant survécu aux années soixante etc. Etonnante foule où se mêlent tambours africains, punks et enfants déguisés en tortues. Ensuite, arrivée au Powderhorn Park pour une grande fête gratuite où Heart of the Beast donne son spectacle et où se tiennent plusieurs scènes libres avec orchestres de tous styles ou d’autres scènes plus petites où s’expriment à foison quantités de penseurs libres. Des stands représentent toutes les associations précitées qui n’ont pas le droit d’y faire commerce. La surprise lorsqu’on participe pour la première fois, c’est cette impression de bien être, de solitude disparue, de se sentir vivant et reconnu dans une foule faite de tout sauf de moutons, une foule non anonyme aux costumes volontiers extravagants ou simplement libérés, de gens qui sourient facilement et qui créent ensemble sans se soucier de leur différence. La Mayday parade d’Heart of the Beast a été créée en 1975 (dernière année de la guerre du Vietnam) et a traversé toutes ces années (Nixon, Ford, Carter, Bush 1, Clinton, Bush 2) sans jamais être récupérée par les politiques (les démocrates que l’on y voit – représentant d’ailleurs les courants moniritaires – y sont très discrets, comme le Green Party) ni les marchands (tout y est gratuit). Ca ne dure qu’un jour chaque année, mais c’est un jour unique. De retour au logis, les nouvelles de France. Là aussi, il faudra bien créer. Mayday ! Mayday !
Jean
Photos : copyright Liz Welch
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1 commentaire:
Autre continent, autre vision, bien loin des remous et des vagues,
juste quelques petits ronds dans l'eau, comme ceux qu'évoquent nos souvenirs d'enfance...
Nous avions compris !
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