Will Sampson, acteur Creek, inoubliable dans Vol au dessus d'un nid de coucou de Milos Forman
Le cinéma est-il l'Amérique ?
En Amérique on ne voit pas les Indiens (on ne sait pas les voir, on ne veut pas
les voir), au cinéma non plus. Même les films sympathiques leur donnent
rarement le rôle essentiel (mettons Soldat Bleu,
Little Big Man, Danse avec les loups). Le « soutien » missionnaire de l'acteur blanc (de renom) reste indispensable
(pour la banque aussi). Le sauveur est alors interprété par Kevin Costner ou Dustin
Hoffman. Dans l'ancien temps relatif, les premiers rôles indiens étaient joués
par des acteurs hollywoodiens plus ou moins grimés (teintés) tels Chuck
Connors, Boris Karloff, Jeff Chandler, Burt Lancaster, Michael Ansara, Charles
Bronson, Victor Jory ou même Elvis Presley ou encore, pour faire plus coloré, par
des latinos comme Anthony Quinn, Ricardo Montalban, Gilbert Roland, Joaquín
Martinez. Et comme le minstrel show must go on, dans la récente production
Disney (compagnie réputée pour ne faire aucun cas des protestations et
critiques indiennes) The Lone Ranger - remake cinématographique de la très américaine série
radio des années 30, elle même adaptée à la télévision dans les années 50 - le
rôle du Comanche Tonto (qui veut dire idiot en Espagnol) est joué de façon
grotesque par Johnny Depp.
Lorsqu’un réalisateur
français comme Arnaud Desplechin s’attache à l’adaptation de Psychothérapie d'un indien des plaines:
réalités et rêve du psychanalyste-anthropologue Georges Devereux, on pourrait
sans trop d’efforts imaginer sortir de cette macabre farce coloniale. Non, la dictature
du cinéma est musclée. Dans son film intitulé Jimmy P. (Psychothérapie d'un Indien des
Plaines), l’indien des plaines en question (un Blackfoot) est joué
par le Portoricain naturalisé Espagnol Benicio Del Toro. Nécessité de vedette ? Distance aveuglée ? Impératif de
production (la banque aussi) ? Le film, sensible de ses qualités, ne peut
tout à fait atteindre son but – même si Benicio Del Toro s’applique - et cette impuissance se niche
précisément dans ce déni d’existence. Gary Farmer* (le vrai grand rôle du Dead Man de Jim Jarmusch), réduit dans ce
long métrage aux utilités, aurait pu endosser ce rôle en plénitude. Les grands acteurs
indiens ne manquent pas. Hollywood les ignore entraînant le reste du monde.
Il est d’autres domaines que
le cinéma où il est plus simple d’échanger les rôles,
il n’est par exemple plus
besoin d’un fasciste pour dire tout haut des saletés racistes à propos des Roms, autre peuple délibérément inconnu, un ministre de
l'intérieur socialiste fait parfaitement l'affaire.
*À propos de Gary Farmer sur le Glob
Aussi sur le Glob : Jean-Luc Godard et les indiens
*À propos de Gary Farmer sur le Glob
Aussi sur le Glob : Jean-Luc Godard et les indiens
2 commentaires:
Merci de formuler cette "chose", de dire cette anomalie qui moi me rend dingue justement.
Judith
Du grain de Valls à l'eau de Vichy il n'y a qu'une gorgée.
Salut Jean ! Merci & bravo. Nous continuons : NOIR sur blanc.
Toute l'amitié,
Christian
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