Salut les ours !
Salut les chats !
Salut les bisons !
Salut les oiseaux !
Salut les tortues !
Salut les baleines !
Salut les pingouins !
Doucement les castors !
Enfants d'Espagne
27.9.14
LES ENFANTS DE CAYENNE
PARABELLUM À NOTRE-DAME-DES-LANDES
"SALUT SCHULTZ"
Le 4 août 2013 (ou plutôt 5 août vers 1h du matin), le groupe Parabellum se dispose sur la scène située sur la Zad de Notre-Dame-des-Landes pour la conclusion musicale de deux jours de soutien à une lutte prototype : idée judicieuse de clore la fête par cette musique d'abondance tendue vers la vie. Mieux que le souvenir ému d'un orchestre s'élançant en 1984 dans les temps durs, nous ravissant par sa franchise avec des titres comme "On est gouvernés par des imbéciles", "Anarchie en Chiraquie" ou ses surprenantes et vibrantes reprises, "Amsterdam" de Jacques Brel (inventaire à jour), celle dynamitée de "Saturnin le canard" (Ricet Barrier), prenant l'absurdité du suffocant vide du marketing des années 80 à revers, Gratuit 2 Morceaux En Moins, Parabellum ce soir-là a livré une musique de plain pied, une langue d'action de circonstance, féconde, un condensé d'indépendance infatigable. Le moment de la reprise de "Cayenne", même s'il est attendu tant cette chanson héritée du tristement célèbre bagne en Guyane Française a été revitalisée par le groupe jusqu'à devenir sienne, est celui de l'affinité, d'une poésie qui va jusqu'au bout des lucidités blessées. Les enfants de Cayenne et leurs pairs, amis et amoureux se reconnaissent dans le monde entier, conscients de l'état des choses, de ses bonds et ses moments de nuit. C'est le refrain qui compte :
"Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Viv' les enfants d'Cayenne ! A bas ceux d'la sur'té !"
Triste nouvelle : Schultz, chanteur et guitariste du groupe s'est fait la belle le 12 septembre dernier à la suite d'une embolie pulmonaire. Salut !
Photo : Llann Wé (Creative commons)
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Notre-Dame-des-Landes
22.9.14
SONG FOR KENNY WHEELER
En 1973, Incus (compagnie indépendante fondée en 1970 par Evan Parker, Derek Bailey et Tony Oxley) sortait un atypique album de leur ami Kenny Wheeler : Song for Someone (réédité sur PSI). La dédicace était aussi définie qu'une "Song for Che" (Charlie Haden) ou "Song for my father" (Horace Silver) par exemple, plus large aussi et plus intime finalement. Song for Someone, avec des titres-clés comme "Causes Are Events" et crème anglaise à l'appui (Tony Oxley, Ron Matthewson, Duncan Lamont, Mike OSborne, Chris Pyne, Ian Hammer, Robert Cornford...), est une œuvre de toutes les hauteurs, de toutes les distances, une lumière dévoilant les multiples touches de temps croisés. Piano électrique (nous sommes au début des années 70), chansons délicates (Norma Winstone), séquences de haut vol énergétiquement délurées (Evan Parker, Derek Bailey), vocabulaire de big band, leçons du passé, fragments d'avenir, histoires à lier, recréer, explorer, faire : le geste est la promesse ; Song for Someone offre à quelqu'un la simple idée maîtresse en version humblement panoramique, que jouer c'est partager, une idée qui peut sauver le monde.
Song for Someone est un beau résumé de la manière Kenny Wheeler, ce magnifique trompettiste qui nous a quittés le 18 septembre à l'âge de 84 ans. Canadien vivant en Angleterre depuis 1952, il fut des premières heures de ce qui deviendra la Free Music aux côtés de John Stevens, Evan Parker, Dave Holland, Derek Bailey en un temps où il crée aussi une première œuvre, très composée, inspirée par Don Quichotte. Son approche délicate de l'instrument autant que de l'écriture (il avouait une fascination pour Paul Hindemith), une idée de la beauté du son, nourrie de toutes les vibrations du jazz, des plus fines harmonies, des chants des peuples portés par le vent, ne vivront aucune séparation, aucun conflit d'école.
On l'écoutera avec Anthony Braxton, le Globe Unity Orchestra, Keith Jarrett, Jacques Pellen, Kristen Nogues, Frederic Rzewski, John Taylor, Ralph Towner, John Abercrombie, François Méchali, Denis Levaillant, Tubby Hayes, United Jazz + Rock Ensemble, Bill Frisell, Lee Konitz, Steve Swallow, Maynard Ferguson, Bill Bruford, Jean-François Jenny-Clark, Alan Hacker, Tony Coe, Gordon Beck, Michel Portal, Philly Joe Jones, Steve Coleman, David Sylvian, Joni Mitchell, Leo Smith, Albert Mangelsdorff, Evan Parker...
Kenny Wheeler est de ces musiciens qui nous ont permis d'entrevoir la possibilité que si c'est bien le premier pas qui compte, il peut aller dans moult directions, engendrer la perspective, faire doucement surgir le sens en divers oasis inattendues, reliées sans violence, comme nous le souhaitons de nos vies.
Song for Someone est un beau résumé de la manière Kenny Wheeler, ce magnifique trompettiste qui nous a quittés le 18 septembre à l'âge de 84 ans. Canadien vivant en Angleterre depuis 1952, il fut des premières heures de ce qui deviendra la Free Music aux côtés de John Stevens, Evan Parker, Dave Holland, Derek Bailey en un temps où il crée aussi une première œuvre, très composée, inspirée par Don Quichotte. Son approche délicate de l'instrument autant que de l'écriture (il avouait une fascination pour Paul Hindemith), une idée de la beauté du son, nourrie de toutes les vibrations du jazz, des plus fines harmonies, des chants des peuples portés par le vent, ne vivront aucune séparation, aucun conflit d'école.
On l'écoutera avec Anthony Braxton, le Globe Unity Orchestra, Keith Jarrett, Jacques Pellen, Kristen Nogues, Frederic Rzewski, John Taylor, Ralph Towner, John Abercrombie, François Méchali, Denis Levaillant, Tubby Hayes, United Jazz + Rock Ensemble, Bill Frisell, Lee Konitz, Steve Swallow, Maynard Ferguson, Bill Bruford, Jean-François Jenny-Clark, Alan Hacker, Tony Coe, Gordon Beck, Michel Portal, Philly Joe Jones, Steve Coleman, David Sylvian, Joni Mitchell, Leo Smith, Albert Mangelsdorff, Evan Parker...
Kenny Wheeler est de ces musiciens qui nous ont permis d'entrevoir la possibilité que si c'est bien le premier pas qui compte, il peut aller dans moult directions, engendrer la perspective, faire doucement surgir le sens en divers oasis inattendues, reliées sans violence, comme nous le souhaitons de nos vies.
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Lost and found,
Musica
11.9.14
LA LIGNE DE CHANCE
D'ANTOINE DUHAMEL
Le compositeur Antoine Duhamel vient de nous quitter, musicien essentiel à la nouvelle vague du cinéma français et artisan d'un pont précieux entre tradition européenne et pratique du jazz.
On pourra consulter un entretien de 2001 dans le journal des Allumés du Jazz (n°6, 2e trimestre) où il fait le point sur sa carrière et ses aspirations (le PDF est consultable en ligne ici)
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Kinéscope,
Lost and found,
Musica
9.9.14
ENCOURAGER LA RECHERCHE
Séquence "encourager la recherche" : Il est des maladies graves pour lesquelles il seraient urgent de trouver un vaccin, l'attalite aiguë par exemple qui depuis des années ronge l'intelligence.
4.9.14
CHRONIQUES DE RÉSISTANCE 2
SALUT À MICHEL LAGRAFEUILLE
Le 30 juillet dernier était présenté l'album Chroniques de résistance aux habitants de Treignac dans la toute neuve et fringante médiathèque de la petite cité corrèzienne. Deux jours avant le coup d'envoi de la quinzième édition du festival Kind of Belou (au choix, on verra dans l'insolite titre de cette fête annuelle un clin d'œil dévergondé à Miles Davis ou bien une solide et taquine affirmation populaire). C'est lors de ce festival, un an plus tôt que fut assemblée par Tony Hymas, la petite troupe de ces Chroniques de résistance (1) : Nathalie Richard, Desdamona ou François Corneloup, compagnes et compagnons de longue date, le trio Journal Intime (Sylvain Bardiau, Frédéric Gastard, Mathias Malher) de fraîche aventure, Peter Hennig ayant auparavant croisé la route du pianiste une seule et belle fois minnesotanne, Frédéric Pierrot, autre évident, frère nécessaire, ou la cadette Elsa Birgé qui en 1996, enfant, reprenait les mots de Buenaventura Durruti pour introduire le projet dédié à l'anarchiste espagnol (2). Cet ensemble d'explorateurs (auquel s'en ajoutent d'autres : Vincent Bailly, Julien Basseres, Jean-Jacques Birgé, Daniel Cacouault, Mary Ann Caws, Robin Emlein, Sylvie Fontaine, Alain Gandolfi, Sylvain Girault, John Holloway, Nancy Kline, Stéphane Levallois, Thierry Mazaud, David Miller, Delia Morris, Jeanne Puchol, Marianne Trintius, Eddy Vaccaro, Isabelle Vedrenne...), tous du côté du mouvement, est un petit pays, fait de sources, de territoires liés, solidaires.
Le cinéaste Frank Cassenti filma les jours qui précédèrent l'enregistrement. Dans son reportage (produit par Oléo Films), on voit et entend Michel Lagrafeuille, jeune résistant de quatorze ans en 1944 qui vit son frère aîné, André 23 ans, résistant aussi, fusillé par les Nazis. Michel Lagrafeuille avait rendu visite aux musiciens, chanteurs et acteurs, assisté au concert le 18 août 2013, heureux. Nous l'avions revu au printemps 2014 à Treignac - village entier de ces Chroniques de résistance -, lors d'une réunion annonçant la sortie du disque, alors encore en chantier.
Faire un disque aujourd'hui, qu'est-ce que ça veut dire ? Un collègue, producteur expérimenté, lucide, indiquait avec insistance récemment qu'il fallait urgemment laisser tomber, à coup de "à quoi bon !", "c'est devenu impossible !", "on se fait baiser à chaque fois !", "ça n'intéresse plus personne !", "pourquoi se faire chier ?". De tels mots, un tel constat, heurtent, traversent les corps labourés, comme si les intentions s'échouaient après des siècles d'échos, de désirs profonds, de conscience intense. Mais ils taquinent la souche aussi à l'endroit même des petites douleurs, des usures et des questions permanentes.
Chroniques de résistance n'est sans doute pas une expérience simple, en mode mode, mais c'est une expérience (3) motivée qui entend (naïvement ?) trouver dans cette motivation - avec les moyens du bord et de réelles amitiés - quelques réponses au défaitisme.
Dans le documentaire de Frank Cassenti, après l'apparition de Michel Lagrafeuille, François Corneloup commente : "D'un seul coup, dans ce qu'on est en train de jouer, il y a cet homme qui arrive avec sa réalité historique et qui est vivant. Là tu te dis : je vais m'appliquer parce que lui il s'est appliqué... pour que l'on puisse encore jouer cette musique-là aujourd'hui".
Le 30 juillet, Michel Lagrafeuille ne put être là, disparu quelques jours plus tôt le 21 juillet ; sa fille Françoise et son fils Philippe le représentaient, aux côtés de Michèle Guingouin et Jean-Jacques Nanot, descendants de figures substantielles de la Résistance. À l'issue du débat, après un long silence, un jeune homme indiqua : "ce silence n'est pas celui de la gêne, mais celui de l'interrogation : ce que nous n'avons pas encore fait".
Les réponses à l'illustre, compétent et fatigué collègue en proie à un compréhensible abandon sont bien là, humblement, dans la nécessaire et opiniâtre transmission d'une résistance à laquelle l'expression (disons artistique) ne saurait se soustraire, parce que d'autres se sont tellement appliqués, parce que nous ne pouvons considérer autre chose que d'en être au commencement (frémir infiniment) et parce qu'on ne saurait se détourner de l'indispensable "ce que nous n'avons pas encore fait". La musique, à sa taille, peut encore en faire partie.
(1) Chroniques de résistance sur le site nato (sorti le 1er septembre 2014 - diffusé par l'Autre Distribution)
(2) Buenaventura Durruti sur le site nato (sorti en 1996, réédité en 2011 - diffusé par l'Autre Distribution)
(3) Sens hendrixien
Photographie extraite du documentaire de Frank Cassenti : Tony Hymas saluant Michel Lagrafeuille avec Frédéric Gastard, Nathalie Richard et Anna Mazaud
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