Il y a toujours quelque chose qui fait qu'un nom entre dans votre histoire pour ensuite devenir un repère déterminant. Par exemple les notes de pochettes des cardinaux albums d'Anthony Braxton pour la maison Arista dans les années 70 produits par Michael Cuscuna....
À 9 ans, Michael Cuscuna joue de la batterie, à 14, il assiste à des concerts d'Art Blakey, Miles Davis et John Coltrane. Ces chocs confirment sa grande passion et plutôt que de ne jamais pouvoir être vraiment musicien comme le sont ces types, il choisit de documenter, enregistrer, témoigner, stimuler de toutes les façons. Très vite il devient un incollable de l'histoire du jazz, celle passée, en train de se faire et en devenir. Il écrit pour Down Beat, a un show radio, s'intéresse aux développements du rock (son amusante interview avec Marc Bolan), travaille chez ESP, entre chez Blue Note, produit chez Atlantic... Dès lors, on va voir son nom associé à près de 3000 disques comme producteur, rééditeur hors pair (il va créer avec Charlie Lourie les incroyables Mosaïc Boxes), et rédacteur de centaines de ce que les spécialistes appellent des "liner notes" (coffrets Miles Davis par exemple). Plus encore que ses nombreuses productions de haut vol à 180° (Art Ensemble of Chicago ou Dave Brubeck pour Atlantic, Bonnie Rait pour Warner ou Charles "Bobo" Shaw pour Muse), c'est peut être son œuvre de fureteur et cette apothéotique obsession du détail (notablement une véritable opération de sauvetage de l'histoire de Blue Note), de celle ultra nourrie et nourrissante des hardiesses d'hier et des audaces d'aujourd'hui pour les libertés de demain, qui survivra à ce funeste 20 avril 2024.