Enfants d'Espagne

Enfants d'Espagne

1.1.08

UN PRINTEMPS POUR FRANK MORGAN




Bel oublié des listes destinées aux inaccessibles îles désertes parce que totalement accessible à ceux qui veulent vivre dans le même monde sans s'en échapper, Telefunken Blues de Kenny Clarke (inventeur de la batterie bop complètement mésestimé car n'ayant pas su ou voulu rester en Amérique du Nord) parut en 1955 sur étiquette Savoy. Qui a écouté ce disque n'a pu rester insensible au son d'alto de Frank Morgan qui apporte au disque cette sorte de poussière lumineuse qui, bien entendue, empêcherait forcément la liquidation du monde. Frank Morgan est né un 23 décembre 1933 à Minneapolis dans une famille de musiciens qui n'avaient pour se chauffer ni âne, ni boeuf (animaux alors servis en pot au feu dans la soupe au canard de l'infâme "démocratiquement élu"). Cet accroc de l'oiseau parkerien s'est mis à l'alto en quittant le pays des lacs pour celui des anges irradiés. Dans la cité californienne, il élabore un jeu hérité du Bird bien sûr, avec une maîtrise de la patience qui aurait dû porter très loin. Très vite poussé sur l'autel des sacrifiés intoxiqués, le gamin, qui à la suite d'un concours de saxophone avait grossi les rangs des troupes de Lionel Hampton, commence ses séjours dans la case prison. Il joue avec Miles Davis (c'est beau), Milt Jackson, et après un premier disque, sa carrière est cassée. Pour trente ans. Trente ans trop de veines-pas de veine et de prisons. Il revient après cet intermède de douleur avec son second disque signé intitulé Easy Living (titre qu'utilisera aussi Sonny Rollins dans des conditions bien différentes). Frank Morgan a pu ensuite enregistrer un beau paquet de disques rarement déposés au pied des sapins (car les sapins marchent sur des oeufs). Evadé avec ce son d'un coeur malmené, attaqué, il veut juste avoir le temps de "prendre son temps et de tout absorber". Il revient à Minneapolis pour un ultime chapitre et claque juste avant Noël 2007. Cette fois, le boeuf et l'âne font de la chair à saucisse pour les imbéciles à Disneyland. Frank Morgan l'a dit dans un superbe album de duos avec des pianistes gravé en 1992, il voulait "croire au printemps". Le printemps en 2008, ça va être notre affaire, ne laissons pas ses fossoyeurs opérer et cassons leurs lunettes de soleil pour faire entrer la vraie lumière, la même que jouait si bien Frank Morgan. Bonne année.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bonne année à vous,
qu'elle soit lumineuse, rythmée, riche en découvertes et aussi éblouissante qu'un printemps.