Enfants d'Espagne

Enfants d'Espagne

9.4.08

MICROS GRANDE



Enregistrer un disque est un acte de présence (n'en déplaise au Colonel Attali). Lors des mixages, on s'inquiète souvent de savoir si tel ou tel instrument est suffisamment présent, mais ce n'est pas tout. Le disque par une sorte de tour de passe passe que Bakounine aurait pu bien décrire (par exemple dans ses réflexions sur l'art et la science in "Dieu et l'Etat") échappe à son abstraction de situation irréaliste et super matérielle pour révéler quelque chose d'assez improbablement unique de la présence musicale dans le monde tel qu'il a été infléchi au 20ème siècle pour devenir une situation étonnamment incarnée de ce réel. Comme au cinéma, la réalisation d'un disque est un acte collectif destiné à un collectif plus grand encore où il est question de commenter, partager et réagir, mais de façon moins abstraite qu'au cinéma. C'est impressionnant ! On ne s'en rend plus compte tant on s'est trop contenté de "lire" les disques et quelques signatures et pas assez de comprendre qu'ils étaient devenus nécessaires à la musique dans un monde assailli par l'horreur industriel comme le cheval pour l'indien d'Amérique quand l'Europe a débarqué ses virus (Colomb, Cortès etc.). Il est bien de penser à Miles Davis et Jimi Hendrix, louable de penser à Teo Macero et Chas Chandler, mais il est juste de penser à Stan Tonkel et Eddie Kramer. Les micros cosmiques des enregistreurs du son existent comme les beaux outils de ceux que l'on nomme ingénieurs (et pour cause).

Sans la détermination des ingénieurs Christian Savouret (première période), Daniel Deshays (seconde période), de Dave Hunt (troisième période), d'Alain Cluzeau (quatrième période), de Jean Taxis (cinquième période), d'Etienne Bultingaire (sixième période) de Jean-Marc Pinaud, Thierry Balasse, Fabrice Maria et Steve Wiese (et nombreux autres plus épisodiquement comme Chris Dibble, Philippe Avril, Curtis Schwartz, Sheridan Tongue, Jim Goatley, Gérard de Haro, Joe Johnson ou Walter Quintus), les disques nato n'auraient aucune consistance. Ces hommes du son nous sont nous, ils nous font marcher les oreilles en donnant l'angle des promenades.

En ce moment même (et c'est précis) Steve Wiese (rencontre fondatrice en l'an 2000) termine à Minneapolis au studio Creation le mixage de l'album Next du saxophoniste François Corneloup, projet projeté où cinq hommes (les autres étant Dominique Pifarély, Dean Magraw, Chico Huff, JT Bates)démontrent que la générosité est l'alchimie de la beauté, de l'inspiration apportant la conscience, de l'amour (ben oui) et de l'âge (progression sensible). Steve Wiese a su non seulement saisir cette intensité superbement simple, mais aussi l'accueillir, la transporter, la transformer d'égale à elle même.

Nous aimons les disques (expériences vivantes).

À suivre ...


Photo : B. Zon

5 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est effectivement bien de penser aux preneurs de son, il y a aussi d'autres acteurs dans la réalisation d'un disque qui ne sont pas moins importants. Comme les gens qui font les images des disques. Défendre la qualité de ce que vous faites c'est aussi parler de tous ces gens-là.

Anonyme a dit…

Seriez vous un descendant d'Emmanuel Poiré ? Vous avez raison bien sûr et nous reviendrons sur d'autres acteurs importants de la réalisation d'un disque (image, mastering etc.). La finition du disque Next avec Steve Wiese (personne exceptionnelle) a suscité naturellement ce commentaire appelant aussi de jolis souvenirs avec d'autres ingénieurs. En consultant notre site www.natomusic.fr, vous verrez que ces différents acteurs ne sont pas oubliés.

Anonyme a dit…

écouter des disques c'est bien ...mais entendre les artistes dont on a aimé les disques, sur scène, c'est mieux, je vais avoir la chance de voir et d'écouter Michel Portal et Vincent Courtois dans ma région fin mai...ce sera mon festival à moi...

Anonyme a dit…

L'écoute (le partage) en direct de musiciens jouant à proximité est évidemment une expérience irremplaçable. Mais de nos jours, cette pratique est également souvent terriblement quantifiée et normalisée. Le disque est un mode d'expression qui (dans les conditions qui sont celles de ce monde) a aussi énormément apporté et permis un développement assez extraordinaire de la musique (Pet Sounds, Bitches Brew, Electric Ladyland, Tijuana Moods? Exile on Main Street ne sont pas des concerts et n'en contiennent pas moins de germe vivant - autrement). Ne les opposez pas ! Les deux peuvent encore pas mal à condition d'encourager, et la musique en direct et la musique sur disque a être elle-même et non d'incolores (€) ersatz aux belles allures maladives, de ce qui a généré tant de vie et le peut encore.

Et bon concert avec Vincent Courtois et Michel Portal !

Anonyme a dit…

je ne les oppose pas, j'aime
"la musique" à condition que par l'écoute ce partage d'émotions soit au rendez-vous , peu importe le moyen en concert ou dans sa version disque...
j'avoue que vos versions sont loin des "erzats" ...
alors vive
"la musique, seul domaine où l'homme réalise le présent"