Enfants d'Espagne

Enfants d'Espagne

6.11.11

CATTANEO A LA LIGNE

Vendredi soir 4 novembre, vernissage de l'exposition International Waters avec Michelle Butterfield, Estella Mare, Bob Bracken, et Cattaneo au Black Dog. L'exposition faisait, tout en complément de ses confrères et consoeurs, part belle à Cattaneo qui expose aussi actuellement à New-York, et qui pour l'occasion dessina en direct ses lignes de fuites, lignes intérieures, lignes de chance, lignes de conduite, lignes de vie en trio avec Nathan Hanson au saxophone et Brian Roessler à la contrebasse (également responsables de moments sensibles en duo, préambules et prolongements). Le point sur son travail actuel en trois réponses.

Quelle réalité préside à tes images ?
Je n'y ai jamais réfléchi en ces termes... J'imagine qu'il s'agit d'une réalité qui n'existait pas avant que je me préoccupe de l'inventer, et dans ce sens ce serait plutôt moi qui la préside, ah ! ah ! En tout cas, une large part de hasard intervient dans la réalisation de mes œuvres. Certes, je crée les conditions favorables à l'émergence d'une énergie vitale qui vient des profondeurs de mon être, et qui va me permettre de m'exprimer : solitude, papier, couleurs, musique... La concentration sert de catalyseur à l'expression de quelque chose de pur, via les gestes improvisés et les boucles tracées sur le papier, sans autre finalité que superposer des lignes et des couleurs dont je tenterai ultérieurement de déterminer (c'est à dire quand la peinture aura fini de sécher) si l'association complexe révèle une harmonie, même convulsive. Avec un peu de chance et beaucoup de détermination je repérerai une zone sur le papier où il s'est passé quelque chose, où je sens un rythme, perçois une séquence narrative, que j'isole, découpe et colle sur une autre feuille, plus épaisse ; je signe en bas et me voilà avec une nouvelle œuvre d'art, ah ! ah ! A quel moment ai-je instillé mes émotions, quand le mariage a-t-il été consommé entre la réalité extérieure (le visible) et le monde de mes sentiments, c'est trop intime pour que je le dévoile ici... Mais c'est d'une histoire de contrôle et de lâcher-prise qu'il s'agit, assaisonnée d'inconscient et de codes culturels aussi. Pourquoi je fais ça ? J'ai un rapport particulier avec la mort, et la peinture telle que je la pratique (la Bande Dessinée aussi, dans une large mesure) est liée à ce que je perçois de cet autre côté du monde. Comme me le disait Moebius un jour où j’étais particulièrement déprimé, je suis une sorte de Chaman, et si j'habitais dans une société dite primitive, je serais considéré comme un être sacré. Eh bien voilà : mon rôle à moi, mon cadeau à l'univers, c'est d'offrir en guise de consolation aux gens qui le peuplent des fragments d'une autre réalité.

Comment a été faite la sélection pour le Black Dog ?
J'ai plutôt laissé les autres décider à ma place, car je suis venu aux Etats-Unis avec une cinquantaine ou une soixantaine de peintures, sans idée préconçue sur ce que je voulais montrer ; la galerie de New York dans laquelle je vais exposer à partir du vendredi 6 novembre a choisi celles qui l'intéressaient avant que je vienne à Minneapolis, après quoi j'ai fait un petit tri et écarté ce qui ne me plaisait plus, puis laissé à Scott Demorainville, qui s'est occupé de l'accrochage au Black Dog, le soin de sélectionner ce qui lui convenait ; en l’occurrence, il a pris tout ce qui restait, ce qui me convient très bien, ah ! ah ! Au final, on doit approcher la quarantaine d'images accrochées au mur, ce dont je suis assez fier.

Cattaneo avec Guy Fawkes et Michelle Butterfield

Mais où est donc passé Slim ?
Slim se trouve actuellement dans une autre dimension de son être, enfin assumée peut-être : il s'est réinventé en renard. Un renard breton, portant un nom américain : Velvet Paw. Il mène une vie compliquée et belle, parcourt nuitamment les rives de Vilaine, est amoureux du fantôme d'Elis Regina et fourbit dans son terrier quelque arme secrète pour renverser l'ordre du monde. Enfin, c'est ce qu'on m'a dit.

Nathan Hanson, Cattaneo, Brian Roessler


Entretien réalisé le 2 novembre - Photos : B. Zon

1 commentaire:

Anonyme a dit…

...quant à Slim, ne vous inquiétez pas, il sourit, un verre à la main et des volutes an coin des lèvres.
Je le sais, il est juste à côté de moi en ce moment.
Souriant, sur un fond bleu paré de mille couleurs.

Sun's grass