Ursus Minor : histoire(s) et actualité(s) du monde. Le nôtre !
Par Olivier Gasnier
Le Tamanoir, Gennevilliers le 26/11/2011.
« Pour moi il y a des disques documentaires et des disques de fictions. Disons que j’essaie de faire des disques de fictions avec un point de vue documentaire. Ursus Minor c’est ça, on raconte une histoire, mais ce n’est pas un conte de fées non plus ». (…) « Il faut parvenir à retrouver le chemin qui relie les musiciens au public. Alors ça pose les questions de savoir ce qu’on fait, pourquoi et comment on le fait. Ursus Minor c’est une modeste interrogation autour de ça. Et ça veut dire aussi que l’on n’est pas tout seul, isolés »*. Y aurait-il meilleure manière de décrire un concert d’Ursus Minor ? Ou, plus précisément les concerts d’Ursus Minor. Car cette semaine l’opportunité était donnée aux franciliens de rencontrer par deux fois le groupe à quelques encablures de distance.
Et de Paris à Gennevilliers, mais comme de Villejuif à Minneapolis par le passé, les musiciens – six depuis le dernier album en date, et même sept l’espace d’un morceau (où le jeune rappeur Moon rejoint le groupe pour sa première "scène") car ceux-là savent recevoir – nous ont raconté un peu de nos vies, un peu des leurs, et beaucoup du vivant. Et avec un naturel et une simplicité tels que, d’évidence, toute éventuelle résistance de qui ne les connaît pas se retrouve bien vite désarmée, offrant alors pleine et libre participation à la rencontre. Car l’échange et l’écoute, au cœur du dispositif et de la démarche du groupe depuis ses débuts, se retrouvent là, dans la proximité immédiate avec le public et font que, plus encore qu’assister à un concert d’Ursus Minor, on y participe. Assis ou debout, intérieurement ou physiquement. C’est pour ça que la fête est de mise, l’espoir aussi donc, pour mieux transcender certaine gravité de la condition humaine. Transcendance et dépassement ne signifiant pas oubli, l’histoire est convoquée, par touches subtiles, pour alimenter le sens de la danse, le « groove », qui transpire du répertoire ursussien, fruit de la combinaison fertile des qualités rythmiques de chacun des membres du collectif. Le foisonnement syncopé et mélodique des tambours de Stokley Williams, porté par des dispositions vocales rares, les décalages inattendus de la main gauche de Tony Hymas sur ses claviers, l’assise tellurique du baryton de François Corneloup, l’implacable fouetté de Mike Scott sur ses cordes associés aux flots souples et gracieux des rappeurs-chanteurs- conteurs Desdamona et Boots Riley génèrent immanquablement un irrépressible battement de pied, battement de cœur, qui nous (re)met en mouvement. Ce n’est pas la moindre des choses dans le monde tel qu’il va.
Cette qualité n’est certes pas l’apanage de ce groupe, nous en connaissons sans doute quelques autres, mais ces joyeux énergumènes, par leur capacité d’improvisation et leur créativité, portent un peu plus haut, un peu plus profondément le niveau d’échange et de dialogue possibles. Du coup, l’expérience fait partie de celles qu’on n’oublie pas mais qu’il est toujours bon de renouveler - ses vertus régénératrices sont indéniables, et essentielles - pour mieux se souvenir de la transmettre à son tour.
* Jean Rochard, en 2005, à l’occasion de la parution du premier opus d’Ursus Minor.
Photos : Z. Ulma
Merci à Johann Mandroux, Fabrice Amghar, Benjamin Bertout, Nathalie Neels, Eléonore Okpisz, Justine Agulhon et à toute l'équipe du Tamanoir
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