L'imagination est un sens cardinal, une indication d'avenir. L'imagination sauve, elle transforme les rêves, elle réalise l'imminence, sublime la révolte et libère l'éphémère. L'imagination habite dans tous les lieux où on l'invite pour des lendemains meilleurs et immédiats, pour un présent complice d'un avenir vivant. Elle ne craint pas les relations complexes, tendues, mais toujours profondément humaines. L'imagination habite aussi (à) Notre-Dame-des-Landes, elle n'habite pas au (le) gouvernement. On ne saurait la confondre avec de calamiteuses trouvailles sans nœuds ni quête : un référendum à propos du projet d'aéroport à Notre-Dame-des-Landes par exemple ; un référendum issu d'officines à la soumission pathétique, hôtels de passe-passe aux mensonges dépourvus de gaieté. Faux-semblant de misère conceptuelle, ce dernier gadget n'a plus aucun rapport, ni avec le sujet, ni avec les circonstances. Seule la promesse d'hypothétiques emplois dépassés par les événements est censée encore peser dans la balance démocratique. Rance ! Aujourd'hui tout est su, tout ! L'inutilité nuisible de l'impossible édifice n'est plus à prouver.
Le 27 février à Notre-Dame-des-Landes, entre Calais et Barjac, plus encore que le formidable 9 janvier à Nantes, une foule de gens d'une merveilleuse diversité que l'Etat ne sait compter avait répondu à l'appel. Marcher, franchir, cheminer, progresser vers la révolte fertile, l'active contradiction, la vie dansée, contre un monde de Moloch qui sacrifie l'enfance véritable, qui tarit les sources. Question de culture. Sans prendre le plus court chemin, ce mouvement, cette commune, cherche, dessine d'autres désirs, d'autres choix que de courir à la perte. Ils sont ici révélés par toutes sortes d'ébauches à enrichir sans cesse. Non au suicide, non au cynisme, oui à l'accueil, au partage et à l'exposé de nos différences.
Ce que nous avons pu voir, ce que nous avons pu vivre, le 27 février entre le goudron de la route et les bordures encore sauvages d'une terre aussi amicale qu'indocile, c'était bien les traces de passage d'humains véritables, imaginatifs, dessinant quelques arpents d'un avenir possible. Zad partout !
Photo : Val K (qui n'est pas là par hasard)