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Enfants d'Espagne
12.12.07
"MA FAC, PRISE D'ASSAUT PAR LA GENDARMERIE, LES CRS ET DES VIGILES PRIVES"
par Alice Verstraeten
Bonjour à tous,
Ma fac (Lyon II) s'enfonce tous les jours un peu plus dans le mépris des étudiants et dans un logique policière qui m'inquiète profondément.
Les médias ne nous suivent pas, ne relayent rien, s'auto censurent ou se font censurer.
Tout a commencé avec la Loi Pécresse de réforme des Universités, signée dans la précipitation cet été par le président de la fac, Monsieur Journès.Certains étudiants et enseignants s'opposent à cette loi.
Les étudiants ont choisi le blocage de l'Université comme mode d'action. On peut être pour ou contre, je ne suis pas sûre que ce choix ai rendu service aux manifestants et à leur image mais aujourd'hui, à la limite, peu importe. On a, pour l'instant, dépassé ce débat.
Depuis quelques jours, le président de l'Université a fait appel aux "forces de l'ordre": des vigiles privés, très jeunes, non assermentés, arrogants et dépassés par les événements, patrouillent dans la fac avec au bras un brassard orange marqué "sécurité". Ils apostrophent tout le monde, tutoient tout le monde, et nous demandent de justifier de notre présence dans l'Université en montrant notre carte "cumul" (une carte magnétique d'étudiant ou d'enseignant qui sert aussi de carte de bibliothèque et de carte... de paiement dans l'enceinte de la fac... ce qui, en soit, ne me plaît déjà pas beaucoup).
Il semble bon de rappeler qu'une Université est, selon la loi, un "établissement public à vocation scientifique et culturelle"...
Les étudiants qui manifestaient scandaient à l'encontre des vigiles, hier matin: "Voyous, racailles." Car certains d'entre eux s'amusent à retenir les étudiantes pour les draguer, d'autres en sont venus aux mains avec des étudiants de leur âge, une étudiante a été "étranglée" avec son écharpe pour qu'elle dégage un passage.
A l'entrée principale du campus de Bron, et rue Chevreul sur le campus des quais du Rhône, dès 7h30 le matin, tous les jours, les CRS arrivent pour déloger les étudiants qui protestent. 9 cars de CRS devant le campus de Bron, 9 cars de CRS devant le campus des quais de Rhône. Ils sont, régulièrement, soutenus par la gendarmerie mobile.
J'étais là, hier matin. Deux de mes étudiantes m'avaient dit avoir été "molestées" par les CRS la veille et voulaient que j'en sois témoin. Eh bien oui, ils les plaquent au sol, les jettent plus loin, les matraquent dans le ventre et sur la tête.
Sur les quais, hier, deux leaders syndicaux étudiants (un de Lyon 2, l'autre de Lyon 3) ont été désignés du doigt par des policiers en civil avant d'être poursuivis dans une rue adjacente par les CRS. Ce qui signifie, nous sommes d'accord, qu'un travail préalable "d'information" a été effectué et que ces arrestations sont ciblées pour détruire les mouvements syndicaux.
Les deux hommes sont en garde-à-vue et devraient être déférés à la Justice aujourd'hui même (donc: il existe désormais des comparutions immédiates pour les manifestants, vous serez prévenus). Dans un communiqué odieux et mensonger, la présidence de la fac dit qu'ils sont "extérieurs à l'Université" et que ces arrestations sont survenues après des troubles. Il n'y a pas eu de troubles autres que la manifestation pacifique, nous sommes plusieurs enseigants à en être témoins.
Un étudiant a été blessé et, une fois aux Urgences, a hérité de douze points de suture sur le crâne. Des étudiants ont été mis en joue au flashball.
Des policiers en civils sont toujours là, dont un homme sur mon campus: de "type méditerrannéen", il porte une grosse doudoune noire, un talkie walkie dans une poche, un appareil photo dans l'autre. Lui et ses camarades filment longuement les manifestants. S'ils ont effectivement été convoqués par le président de l'Université dans le seul but de permettre aux étudiants qui veulent suivre les cours d'entrer dans la fac, pourquoi filment-ils? Doit-on ajouter la DGSE à la liste des membres du personnel de l'université?
De notre côté, enseignants ou étudiants, ils nous empêchent un maximum de filmer. Ce qui siginifie que les images disponibles sur youtube et sur dailymotion ne sont pas à la hauteur de la réalité.
Face à cette situation, plusieurs enseignants, dont je suis, ont refusé de faire cours. Je refuse d'entrer dans une fac investie de forces de police, de gendramerie et de vigiles privés non assermentés. Je refuse de montrer des papiers d'identité pour me rendre sur mon lieu de travail. Je refuse de me faire bousculer par des CRS. Je refuse de me faire tutoyer avec mépris par des individus que je ne connais pas. Je refuse d'entendre un vigile insulter un de mes collègues (pourtant munis du sac en cuir typique de l'enseignant, pourtant plus honorable que moi dans l'allure avec ses cheveux blancs) en lui disant "J'vais t'fumer toi, j'vais t'fumer."
Nous ne sommes pas, que je sache, dans un état policier. Ou alors il faut nous le dire clairement, parce que cela signifie que les règles du jeu ont changé. Je croyais que l'on avait le droit de grève dans notre pays.
Je crois que ce qui m'inquiète le plus, c'est de recevoir des communiqués de la Présidence affirmant que la situation est désormais "normale".
SI CETTE SITUATION EST NORMALE, JE DEMISSIONNE.
D'autre part, pour permettre l'action des ces policiers, militaires et vigiles, toutes les sorties de sécurité sont bloquées. Certains enseignants et étudiants s'obstinent à faire cours dans une ambiance délétère et dangereuse. Ce qu'ils risquent purement et simplement, en cas d'incendie, c'est de brûler vifs dans des locaux qui sont déjà vétustes.
Je joins à ce message la "Lettre ouverte à la présidence de Lyon 2"rédigée par des enseignants (datée d'avant hier 5 décembre et déjà dépassée par les événements d'hier), ainsi que le dernier message de la présidence elle-même, pour que vous puissiez juger vous-même de la mauvaise foi, du mépris et des ronds de jambe du langage qui se banalisent dans notre environnement politique et médiatique.
Ce message est, bien sûr, à faire passer si vous en ressentez le besoin.
"LETTRE OUVERTE A MONSIEUR LE PRESIDENT DE L’UNIVERSITÉ LUMIÈRE-LYON 2
Monsieur le Président,
Ne croyons pas que l’ouverture des locaux de l’université Lumière-Lyon 2 ait permis de rétablir une situation propice à une reprise normale du travail.
La présence policière aux abords de l’université, les contrôles d’identité aux portes d’entrée et les rondes de vigiles créent un climat de suspicion qui nuit au bon déroulement des enseignements. La fermeture, à clé, des issues de secours, dans un lieu qui accueille du public, fait porter sur les épaules de la présidence, sur celles des enseignants et des personnels administratifs, une lourde responsabilité en cas d’accident. Actuellement un grand nombre d’étudiants nous appelle de l’extérieur nous disant leur refus d’entrer dans l’université. Certains enseignants veulent faire valoir leur droit de retrait. Les salles de TD et d’amphi sont quasiment vides.
Pour permettre le prompt rétablissement des conditions propices à l’écoute et au respect mutuel :
Nous exigeons, monsieur le président, la levée immédiate de ces mesures pour que nous puissions assurer notre mission d’enseignants chercheurs et que l’université demeure un établissement public à caractère scientifique et culturel. Nous vous demandons aussi de vous engager, auprès de la commission pour la mise en place d’Etats généraux des universités et de la recherche, à lui apporter les moyens nécessaires à la poursuite de ses objectifs.
Ces deux points permettraient de renouer le lien entre les différentes catégories d’acteurs et de faire en sorte que la mobilisation des étudiants pour le devenir de leur université ne leur apparaisse pas vaine.
Bien cordialement
Philippe Abrahami, MCF Histoire de l'art et Archéologie
Gilles Armani, Chargé d’enseignement Ethnologie
Jean-Pierre Audureau, PRAG Sciences de l’Education
Jean-Yves Authier, PR Sociologie
Norbert Bandier, MCF Sociologie
Maks Banens, MCF Démographie
Jennifer Bidet, Monitrice Sociologie
Jean Blanchard, Chargé d’enseignement, Ethnologie
Géraldine Bois, ATER Sociologie
Thierry Boissière, MCF Ethnologie,
Julien Bonhomme, MCF Anthropologie
Estelle Bonnet, MCF Sociologie
Loïc Bonneval, Chargé d’enseignement Sociologie
Jacques Bonniel, MCF Sociologie
Dominique Bourgain, PR Communication
Cécile Bousquet, Chargée d’enseignement Sociologie
Ramain Bragard, ATER Ethnologie,
João Carlos Pereira, MCF Langues Romanes
Denis Cerclet, MCF Ethnologie
Pascal Chasson, Chargé d’enseignement Sociologie
Ali Cheiban, MCF Sociologie
Yannick Chevalier MCF Stylistique française LESLA
Catherine Chauvin, Chargée d'enseignement Sociologie
Monique Dalud-Vincent, MCF Sociologie
Jean-Hughes Déchaux, PR Sociologie
Keith Dixon PR Etudes Anglophones
Martine Faure, MCF Préhistoire
Sylvia Faure, MCF Sociologie
Cherif Ferjani, PR Langues et civilisations etrangeres
Carla Fernandes, PR Langues Romanes
Olivier Ferret, MCF Lettres
Agnès Fontvieille, MCF Langue et littérature françaises
Spyros Franguiadakis, MCF Sociologie
Isabelle Garcin-Marrou, PR, IEP
Jacques Gerstenkorn, PR Cinéma
Pierre Gilbert, Chargé d’enseignement Sociologie
Anne-Claire Gilson, MCF Langues Romanes
Colin Giraud, Moniteur, Sociologie
Olivier Givre, MCF Ethnologie
Yves Gonzalez-Quijano, Etudes arabes
Marie-Gabrielle Guérard, CNRS "Histoire et sources des mondes antiques" (UMR 5189)
Axel Guioux, MCF Ethnologie
Camille Hamidi, MCF Science politique
Gilles Herreros, MCF Sociologie
Claude Jamet, Icom
Fabienne Jullien, PAST Ethnologie
Ian Lamb, PRAG Anglais
Bernard Lamizet, PR IEP
Marie-Clémence Le Pape, ATER Sociologie
François Laplantine, PR Ethnologie
Gwenola Le Naour, MCF Science politique
Marie-Clémence Le Pape, ATER Sociologie
Vincent Mabillot, MCF Icom
Catherine Maisonneuve, Chargée d’enseignement Anthropologie
Isabelle Mallon, MCF Sociologie
Alexis Martig, Chargé d’enseignement Ethnologie
Sylvie Martin-Guarrigue, MCF Langues Romanes
Béatrice Maurines, MCF Sociologie
Maxime Michaud, Chargé d’enseignement Sociologie
Serge Molon, PRCE Lettres
Anne-Cécile Nentwig, ATER Sociologie
Lionel Obadia, PR Ethnologie
Claudia Palazzolo, MCF ASIE
Daniel Pelligra, Chargé d’enseignement, Anthropologie
Marylène Possamai, MCF Lettres
Bertrand Ravon, MCF Sociologie
Franck Rebillard, MCF Communication
Juliette Rennes, MCF Communication
Corinne Rostaing, MCF Sociologie
Olivier Rouault, PR Archéologie du Proche-Orient ancien
Max Sanier, MCF IEP
Jorge Santiago, PR Langues romanes
Mohammed Seffahi, IE Sociologie
Martin Soares, MCF Ethnologie
William Spano, MCF Icom
Daniel Thin, MCF Sociologie
Philippe Somnolet, Chargé de cours, ethnologie
Marianne Thivend, MCF Histoire
Anne-Lise Touboul, MCF Communication
Caroline Touraut, Chargée d’enseignement Sociologie
Alice Verstraeten, Allocataire Ethnologie
Aude Volpilhac, ATER Lettres Modernes"
"Communiqué de la Présidence de l’Université Lyon 2, 6 décembre 2007.
Ce jeudi matin 6 décembre, une tentative de blocage a eu lieu sur les deux campus de Lyon 2.
Sur le campus de Bron, afin d’éviter l’intervention des forces de police, des personnels ont réalisé un cordon de sécurité pour rendre possible l’entrée des étudiants et du personnel dans les bâtiments.
Hélas, cette organisation n’a pu fonctionner que vingt minutes, du fait du blocage.
Sur le campus Berges du Rhône un début d’affrontement a eu lieu entreles étudiants qui désiraient se rendre en cours et des étudiants bloquant l’entrée de l’intérieur puis de l’extérieur.
Cet état de fait a contraint la présidence à faire appel aux forces de police. Deux personnes, extérieures à Lyon 2, ont été interpellées pour coups et blessures et un étudiant ainsi que trois policiers auraient été blessés.
Chacun d’entre nous mesure la gravité de la situation actuelle et l’émotion ressentie face à ces événements est partagée. Aucun d’entre nous ne souhaite le maintien des forces de l’ordre mais leur présence est la conséquence du blocage.
Seule la fin du blocage permettra de poursuivre un dialogue dont la possibilité a toujours existé.
Le dispositif actuellement en place pour l’accès aux bâtiments est maintenu pour le vendredi 7 décembre. Il a permis, diversement selon les composantes, que la plupart des enseignements soient assurés. Nous remercions les personnels enseignants et administratifs qui y ont contribué.
Précisons que les conditions de sécurité des locaux, principalement sur le campus Portes des Alpes où des inquiétudes se sont exprimées, ont été validées par la commission de sécurité.
La présidence"
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2 commentaires:
On doit avoir honte quand on exhibe en comparaison une photo de 1942.
C'est une injure à la véritable souffrance et au vrai courage.
Je ne vous félicite pas pour cette bêtise.
Les rapprochements d'une image et d'un texte de natures différentes peuvent induire des fonctions différentes : de manipulation, d'orientation, mais aussi d'éclaircissement et de réflexion. C'est dans cette seconde catégorie que je rangerais celui-ci. Car si nous n'en sommes évidemment pas à la situation tragique de l'Allemagne des années 30, nous sommes dans une situation très préoccupante et en voie de tragique. Aussi il n'est jamais mauvais de méditer sur la fin en même temps commencement.
Il n'est jamais mauvais non plus en démocratie de se définir autrement qu'en "anonymeé.
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