Scandaleuse, la radio scandaleuse ment
scandaleusement. Qu’elle s’appelle Info ou Inter, elle répète déjà depuis la
veille que le 1er mai
célèbre « la fête du travail ». Le petit régent lui-même a repris
cette terminologie. C'est bien pratique et insultant.
Doit-on une fois
encore faire le rappel historique de l’origine du 1er mai, fête des
travailleurs ? Rappeler qu’à l’issue de la grande grève de Chicago à
l'usine McCormick le 1er mai 1886, suivie nationalement par 340 000 ouvriers,
alors qu’August Spies, militant anarchiste, termine son discours avant la dispersion,
la police charge et tue au moins deux ouvriers de McCormick [1] en en blessant plus d'une dizaine d'autres ;
évoquer le meeting de Haymarket Square organisé trois jours plus
tard par Spies et deux autres
anarchistes, Albert Parsons et Samuel Fielden, toujours à Chicago, lorsqu’au moment de la dispersion, la police charge et qu’explose une mystérieuse bombe tuant un policier puis sept autres dans le chaos suivant [2] ; retracer l’arrestation de huit
anarchistes tenus responsables sans la moindre preuve : Spies, Parsons,
Fielden ainsi que George Engel, Adolph Fischer, Louis Lingg, Michael Schwab, Oscar
Neebe, suivie de leur procès parce qu'ils luttaient
pour la journée de huit heures, puis leur condamnation à mort [3]
au motif énoncé – ordonné - par le procureur Julius Grinnel « Messieurs
du jury : condamnez ces hommes, faites d'eux un exemple, faites-les pendre
et vous sauverez nos institutions et notre société » ; et souligner enfin qu’en 1889, à
Paris, la IIe internationale choisit le 1er mai comme fête des
travailleurs pour obtenir la réduction horaire de la journée de travail, en hommage aux
huit de Haymarket.
Non le 1er
mai, n’en déplaise aux nostalgiques maréchalistes [4],
aux sanglants productivistes et aux apprentis esclavagistes, n’est pas la fête
du travail, mais son contraire, la fête des travailleurs pour la diminution du
temps de travail et le retour à la vie. Et c’est bien du retour à la vie [5] qu’il
s’agit aujourd’hui plutôt que du retour au travail comme seule aptitude
humaine.
Là encore,
l’impressionnante confiscation du langage redétermine par à-coups successifs et
incessants les contours de nos vies, pour enlever nos vies elles-mêmes… comme
un virus.
[1] Selon les sources, les chiffres varient - on trouve les chiffres des ouvriers de MacCormick tués de 1 à 3 - d'autres morts sont parfois évoqués.
[2] Selon les sources : côté manifestants entre 4 et 7 morts et jusqu'à une centaine de blessés.
[4] Le 24 avril 1941, le maréchal Philippe Pétain par la loi Belin renomme le 1er mai « fête du Travail et de la Concorde sociale » mettant en place la devise « Travail, Famille, Patrie » interdisant le vocable « la fête des travailleurs » au motif qu’il fut porteur de lutte des classes.
[5] Différente de la télévie
3 commentaires:
Un camarade nous écrit avec cette juste recommandation
"Tu peux ajouter... lire Frank Harris, La Bombe..."
Les chiffres sont largement exagérés. Dans la manifestation du 1 et mai "seulement" 3 personnes ont été tués (non pas 12!) et une dizaine ont été blessés (et non une centaine)...
Merci de votre commentaire. Les chiffres varient effectivement selon les différents témoignages et journaux d'époques. Nous les avons "relativisés". Mais les faits sont bien là. Le nombre de participants à la grève que nous avons cité varie également, dans certains ouvrages, il est de plus de 500 000 grévistes.
Enregistrer un commentaire