De retour du Liban, où il était de retour du Canada où il était de retour des Etats-Unis d'Amérique, de son territoire de Bourgogne, Didier Petit nous a livré ses impressions à chaud.
Il semble que ce besoin de voyage que tu prends en charge toi-même soit le prolongement direct de ton jeu et de son évolution. Qu'y trouves-tu ?
Didier Petit : Dans un voyage il y a beaucoup de choses qui se mélangent. La rencontre avec les autres (j'ai toujours aimé les gens et j'aime beaucoup passer un moment dans leurs lieux de vie) mais aussi la rencontre avec soi-même et le débroussaillage qui en résulte. Dans le voyage, il n'y a pas de jugement mais un parcours choisi et donc le choix de la contrainte. Perec (mais pas seulement lui), un écrivain que j'aime beaucoup, affirmait que si nous avons une liberté, c'est celle de choisir nos propres contraintes ... Je suis évidemment pour cette idée de la liberté. D'où le fait que je fabrique mes propres tribulations et mes rencontres. Dans le voyage, il y a aussi le temps du voyage : avancer tout en étant immobile assis dans un fauteuil (le train, le bus, l'avion), le pont (cet entre-deux entre le point de départ et le point d'arrivée), l'attente avant le départ (mais aussi celle de la personne qui doit venir vous chercher et qui parfois ne vient pas !?)
une solitude pleine de tout ce qui se passe. Il faut le redire, la musique, c'est l'art du temps et quand on se retrouve dans d'autres temps (aussi bien géographique que temporel), on se découvre d'autres musiques tout en restant le même. Je ne suis pas un musicien brillant au sens technique du terme, j'ai toujours considéré que je n'étais qu'un transmetteur de sensations qui me traversent. De tout ce que les rencontres m'apportent, de ce que les autres m'apportent sans préjuger de ce qu'ils sont. C'est banal de le dire mais la musique a cela de formidable qu'elle permet de toucher tant de situations différentes, de classes sociales très différentes, de cultures si différentes, de personnes tellement différentes !!! Tout cela me transperce et me charge et je le restitue avec mon violoncelle comme je peux car c'est le seul outil que j'aie à ma disposition et que je connais un peu depuis quarante ans que je le pratique.
Quelle sont ces différences entre ta tournée Nord Américaine de l'an passé et celle de cette année ?
Comme l'année dernière, j'ai déjà fait halte à Chicago (et voilà les habitudes qui s'installent déjà) où j'ai pu retrouver mes amis(e) Nicole Mitchell, Mars Williams, Jim Baker, Brian Sandstrom et Steve Hunt, très belle soirée au Velvet Lounge de Fred Anderson. Puis St Paul avec Viv Corringham, Milo Fine, Nathan Hanson, Lara Hanson, JT Bates et Adam Linz.
Changement de Côte : Portland avec Tim Duroche et Joe Grossman. Seattle tout seul et enfin Vancouver et Robert Creek avec Viviane Houle et Stefan Smulovitz.
J'ai donc finalement rencontré beaucoup plus de gens que l'année dernière et de façon équilibrée entre ceux avec qui j'avais déjà joué et ceux qui m'étaient inconnus. Un équilibre très important entre des rencontres nouvelles et la construction à long terme d'une musicalité commune.
L'an dernier tu étais quasiment passé de l'Amérique du Nord en Chine et cette année au Liban, ce qui ajoute non seulement en valeur de contraste au plan général (un côté Jules Vernes), mais aussi à quelque chose de directement identifiable - toujours sur les contrastes - dans ce que tu joues. Prévois-tu une autre aventure américaine l'an prochain et quelle sera la destination suivante ?
Didier : C'est le monde qui est contrasté. La perception que j'ai de ce monde change jour après jour. Non seulement j'en accepte la diversité mais je l'aime cette diversité. Ainsi que la fin des pensées monolithiques. Il est beaucoup plus difficile aujourd'hui d'accepter une seule propagande (du latin propaganda qui signifie progresser par bouture). Au minimum, nous sommes dans l'obligation d'accepter plusieurs types de propagandes et donc de nous frayer un chemin au milieu de ce bordel. C'est fou ce que j'aime le bordel. Aller d'un pays à l'autre, se laisser traverser, vivre avec les gens et confronter les modes, se bousculer, écouter les sons bref en un seul mot, voyager.
L'an dernier tu étais quasiment passé de l'Amérique du Nord en Chine et cette année au Liban, ce qui ajoute non seulement en valeur de contraste au plan général (un côté Jules Vernes), mais aussi à quelque chose de directement identifiable - toujours sur les contrastes - dans ce que tu joues. Prévois-tu une autre aventure américaine l'an prochain et quelle sera la destination suivante ?
Cette année, je retourne en Chine pour une autre tournée en Juin, cette fois en trio avec Xu Fengxia (Guzheng) et Sylvain Kassap (clarinettes).
Je compte bien revenir chaque année aux Etats-Unis ainsi qu'en Chine et intercaler d'autres pays au gré des humeurs. Chaque fois que je voyage, je rencontre des gens magnifiques qui me nourrissent et maintiennent mon indécrottable optimisme vis-à-vis de l'humanité. Il y a plein de belles choses dans ce monde.
Episode : St Paul inLes voyages extraordinaires de Didier Petit
Entretien avec Pamela Espeland
Intégrale Petit en Amérique et autres territoires
Photographie de Guillaume Roy et Didier Petit au Liban par Corinne Frimat (avec le I phone de Guillaume) Guillaume et Corinne avaient, en février, rencontré les amis minnesotans de Didier Petit à La Grande Boutique de Langonnet.
2 commentaires:
C'est intéressant les pérégrinations de votre violoncelliste. On aimerait en savoir plus sur le Liban tout de même.
Propagande, propagande ! ...
Comme tu fais référence au latin tu devrais bien dire "provigner" ce qui serait plus digne de ton terroir ! !
Mais ça m'inquiète un peu pour toi cette maladie du "bouturage" ...
Je me demande si tout cela est bien innocent ? ! ! ...
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