Tony Hymas – en compagnie des frères Bates – avait marqué l’année passée avec le troisième enregistrement en trio de sa pourtant riche carrière, « Blue Door », modèle du genre et en passe de devenir une référence. Cette perle, bâtie sur la complicité – celle du trio, de la fratrie rythmique et plus encore de la fratrie d’âmes et de cœurs -, n’en finit pas de révéler ses multiples éclats au fil du temps. Force mélodique des compositions, articulation du discours « impro-composé », et foisonnement des idées auraient même tendance à faire oublier la virtuosité du pianiste, une virtuosité indéniable, jamais gratuite, et à souligner tant le talent de Hymas est grand à en faire un discret outil de transmission de sens et d’émotions, c’est-à-dire toujours au service de la musique.
Aussi, pour les connaisseurs de l’album, ce fut sans doute avec une sorte d’impatience sereine qu’ils purent avoir envie d’écouter le trio sur scène - ce 5 février dans le cadre du festival Sons d’hiver, fidèle compagnon d’aventures de Tony Hymas -, pour mieux éprouver les sensations rencontrées au disque. Pour les autres, l’occasion fut non moins belle de découvrir et rencontrer ce trio hors-pair (!), et de constater, en faisant connaissance avec ces musiciens, anglais pour l’un, américains pour les autres, que le talent n’avait point besoin de grande notoriété pour s’exprimer pleinement et donner autant, sinon davantage, de plaisir.
Le pianiste fit preuve d’une inspiration particulièrement réjouissante tant par l’aisance dans l’expression de ses idées que par le plaisir, très communicatif, qu’il a paru y trouver – et son jeu entre main droite et main gauche demeure toujours aussi envoutant qu’impressionnant. Quant à la fameuse section rythmique de la formule du trio jazz, celle composée par Chris et JT Bates, respectivement contrebassiste et batteur, si elle bénéficie certainement des liens de sang qui l’unisse, ceux-ci ne seraient pas suffisants pour faire d’elle une rythmique non seulement digne de ce nom mais également à la hauteur du niveau du discours du pianiste, c’est-à-dire tout autant capable de répondre aux propositions de ce dernier que de le stimuler à aller explorer des sentiers peut-être pas inconnus – l’homme est de grande(s) expérience(s) - mais probablement peu ou moins battus. Et c’est sans doute l’alliance de deux personnalités complémentaires, différentes bien que proches, qui permet cette heureuse alchimie au sein du trio, le contrebassiste faisant montre de respect et de connaissance de la tradition tout en étant capable de subtiles digressions, tandis que le batteur, tout en s’appuyant sur l’histoire de l’instrument, apporte à son jeu, et ce faisant à la musique, une diversité d’influences dépassant le cadre déjà large du jazz, et s’abreuvant aussi bien au rock, qu’à la country, au folk ou encore au blues – ainsi du groove imparable sur « The way back home ».
Avoir pu profiter, et partager avec ces musiciens une bonne partie du répertoire enregistré pour « Blue Door », tout en étant confronté à de nouvelles surprises via d’autres thèmes, fera certainement de ce moment émouvant, où l'on jubila
aussi, un souvenir vif et enthousiaste, précieux pour garder force et esprit aux aguets dans le monde tel qu’il va.
Olivier Gasnier
Photo : © Didier Adam
Remerciements chaleureux à Fabien, Leda, Armelle, Nathalie, Valérie, Claude, Jacques et les équipes de Sons d'Hiver et de l'Espace Jean Vilar à Arcueil
Sur le Glob : Dansons avec JT Bates et Stokley Williams
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